Quelle est la situation de la malnutrition à Madagascar ?
Contexte général persistant
Dans un pays qui peine encore à retrouver une stabilité institutionnelle et politique durable, malgré le retour à un processus électoral démocratique, Madagascar continue de faire face à des défis sociaux majeurs. L'énergie consacrée aux débats politiques semble parfois détourner l'attention des enjeux fondamentaux de développement.
Chiffres de la malnutrition : une situation qui reste alarmante
Malnutrition chronique
46% des enfants malgaches restent touchés par la malnutrition chronique, un chiffre qui n'a pratiquement pas évolué depuis des années. Cette statistique, confirmée par l'UNICEF et les organismes internationaux, place Madagascar au 5ème rang mondial des pays les plus affectés par ce fléau.
Environ 2 millions d'enfants de moins de 5 ans souffrent d'une forme de malnutrition, principalement dans les zones rurales où vivent plus de 80% de la population.
Malnutrition aiguë : des crises régionales dramatiques
Sud de Madagascar : Situation catastrophique avec jusqu'à 500 000 enfants de moins de 5 ans risquant de souffrir de malnutrition aiguë, dont 110 000 dans un état grave
Sud-Est : 115 000 enfants ont eu besoin d'un traitement contre la malnutrition en 2023 suite aux cyclones successifs
District d'Ambovombe-Androy : Taux de malnutrition aiguë globale atteignant 27%, situation proche de la famine
Répartition géographique : aucune région épargnée
Contrairement aux idées reçues, aucune région de Madagascar ne fait exception :
Sud : la zone la plus critique
Sécheresses chroniques depuis plusieurs années
Insécurité causée par les dahalo (bandits) qui appauvrissent davantage les communautés
Plus de 1,14 million de personnes en situation d'insécurité alimentaire
Autres régions
Sud-Est : Vulnérable aux cyclones (Batsirai, Emnati en 2022, autres tempêtes en 2023)
Région Atsimo Atsinanana : Taux de malnutrition aiguë de 12,4%
Centres urbains : Même à Antananarivo, la malnutrition touche les quartiers défavorisés
Impact sur le développement
Conséquences physiologiques
Retard de croissance irréversible pour près de la moitié des enfants
Développement intellectuel compromis affectant les capacités d'apprentissage
Fragilité accrue face aux maladies (risque de mortalité multiplié par 9)
Signes visibles : dents déchaussées, maigreur, ventre distendu
Cercle vicieux de la pauvreté
Les enfants malnutris deviennent des adultes moins productifs, perpétuant le cycle de pauvreté qui touche 75% de la population (24,8 millions de personnes sous le seuil de 4 000 ariary/jour).
Causes structurelles persistantes
Sous-exploitation agricole
3 millions d'hectares cultivés sur 36 millions d'hectares de terres cultivables disponibles
Potentiel agricole largement inexploité : seulement 8% des terres arables utilisées
Faibles rendements rizicoles
Production de riz : Progrès encourageants mais insuffisants
Rendement traditionnel : 2,5-2,7 tonnes/hectare (vs 6 tonnes dans d'autres pays producteurs)
Nouvelles techniques : Amélioration à 5 tonnes/hectare avec le projet PAPRIZ II
Variétés hybrides : Jusqu'à 8,5 tonnes/hectare dans les projets pilotes
Record exceptionnel : 14,5 tonnes/hectare dans la région Alaotra Mangoro
Dépendance aux importations
Production 2024 : 5,32 millions de tonnes de riz paddy
Besoins nationaux : 3,7 millions de tonnes de riz usiné
Importations 2024 : 262 100 tonnes (en baisse de 53% vs 2023)
Autosuffisance : 87,3% en 2023 (vs 78,84% en 2022)
Initiatives encourageantes
Amélioration des techniques agricoles
Projet PAPRIZ II (avec la coopération japonaise) : généralisation des bonnes pratiques
Coopération Sud-Sud avec la Chine : introduction de variétés à haut rendement
Objectif 2025 : 100 000 hectares supplémentaires de riz, production de 1 million de tonnes additionnelles
Actions nutritionnelles
Programmes UNICEF/PAM : traitement de plus de 30 000 enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère
Supplémentation : 3,6 millions d'enfants bénéficient de vitamine A et vermifuge
Dépistage : 2,15 millions d'enfants dépistés annuellement
L'action d'Esperanza dans ce contexte
Face à cette situation, l'action d'Esperanza avec les Frères des Campagnes Malgaches prend tout son sens :
Production de spiruline (Ferme Fanantenana)
Efficacité spatiale remarquable : 2000 m² seulement pour plus de 4000 bénéficiaires
Performance technique : Rendements atteignant les meilleurs standards internationaux
Économie locale : Achat local plutôt qu'importation de compléments nutritionnels coûteux
Circuit économique vertueux
Achats locaux pour les cantines scolaires
Rémunération des cuisinières et équipes locales
Financement de l'écolage pour maintenir les enseignants
Développement des compétences et amélioration continue des performances
Cette approche illustre parfaitement la nécessité de développer le sens du résultat, la mesure et la recherche d'amélioration des performances - valeurs essentielles pour sortir Madagascar de l'impasse nutritionnelle et économique.
Conclusion
Malgré quelques progrès dans la production rizicole et l'autosuffisance alimentaire, la malnutrition reste un fléau majeur à Madagascar. L'action coordonnée d'organisations comme Esperanza, couplée aux efforts gouvernementaux et internationaux, s'avère indispensable pour briser le cercle vicieux malnutrition-pauvreté-sous-développement.
Sources : UNICEF Madagascar, PAM, FAO, Ministère de l'Agriculture malgache, observatoire du riz, Coalition pour le développement du riz en Afrique (CARD) - 2024-2025